Master 2 "Droit de la Montagne" - UGA USMB

Accident dans un Snow Park/ Charge de la preuve/ Faute de l’exploitant (non)

Cour de cassation chambre civile 1 Audience publique du mercredi 8 février 2017 N° de pourvoi: 15-28025 Non publié au bulletin Rejet Mme Batut (président), président SCP Boutet et Hourdeaux, SCP Gadiou et Chevallier, avocat(s) Texte intégral REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant : Sur le moyen unique : Attendu, selon l’arrêt attaqué (Chambéry, 1er octobre 2015), que, le 2 mars 2004, M. Benjamin X… a été victime d’un accident de snowboard sur le domaine skiable de Val-Cenis, en chutant sur le dos à la réception d’un saut sur une bosse aménagée dans un snow-park ; que les blessures subies ont entraîné sa paraplégie ; que M. Benjamin X… et sa proche famille, M. François X…, Mme Y…, épouse X…, Mme Malorie X…, Mme Sylvaine X… et M. Baptiste X… ont assigné le Syndicat intercommunal des remontées mécaniques et des pistes de Val-Cenis afin d’obtenir l’indemnisation de leurs préjudices ; Attendu que les consorts X… font grief à l’arrêt de rejeter l’ensemble de leurs demandes, alors, selon le moyen : 1°/ que la cour d’appel a relevé que le module, cause de l’accident, était « gelé », avec « des petits amas de glace et certaines excavations » ; qu’il résultait ainsi de ses propres constatations que la piste de snowboard était « anormalement » dangereuse puisqu’elle présentait un risque qui n’était pas inhérent à la pratique du snowboard lui-même et ne permettait pas de pratiquer le snowboard dans de bonnes conditions ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l’article 1147 du code civil ; 2°/ que l’exploitant d’une piste de ski a l’obligation d’anticiper les dangers éventuels en signalant le risque auquel s’exposent les usagers ; qu’en décidant que seul un danger indécelable par un skieur normalement prudent devait être interdit ou signalé par l’exploitant de la piste, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ; 3°/ qu’en se bornant à retenir que la pente de la piste d’impulsion était visible, sans relever que le snowboarder était en mesure, sur le point de départ, de constater l’état de la piste gelée et les excavations au sommet de la zone d’impulsion, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ; 4°/ qu’après avoir constaté que le module, cause de l’accident, était « gelé », avec « des petits amas de glace et certaines excavations », la cour d’appel a exclu toute faute du syndicat motif pris de ce que ces circonstances « ne caractérisent pas un danger anormal ou excessif empêchant de franchir cet obstacle » ; qu’en se bornant, ainsi, à constater que l’exploitant n’était pas tenu de condamner l’accès à ce module, sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si ces défauts de la piste n’auraient pas dû, à tout le moins, être signalés par l’exploitant à l’attention des usagers, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ; 5°/ qu’il résultait tant du rapport de l’expert de la MAIF que de l’attestation de M. Z… que le module à l’origine de l’accident avait été condamné dès le lendemain ; qu’il ne s’agissait donc pas là de la mise en place d’une simple signalisation destinée à « inciter les usagers à redoubler de prudence » ; qu’en se déterminant pourtant de la sorte, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et a, derechef, privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ; 6°/ que la signalisation à l’entrée du snow-park afférente seulement aux risques de la pratique en général n’était pas de nature à alerter les snowboarders sur l’état de la neige (durcie et gelée) et sur l’existence d’excavations sur la piste d’impulsion ; qu’en conséquence, la cour d’appel, en retenant l’existence d’une telle signalisation, s’est encore déterminée par un motif inopérant, privant sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ; Mais attendu, d’abord, qu’ayant estimé que les témoignages faisant état d’une piste gelée, de petits amas de glace et de certaines excavations constituaient des observations imprécises qui ne caractérisaient pas un danger anormal ou excessif empêchant de franchir l’obstacle aménagé, la cour d’appel en a souverainement déduit qu’ils n’étaient pas susceptibles de démontrer une faute de l’exploitant ; Attendu, ensuite, qu’en énonçant qu’il appartenait à la victime de démontrer qu’au jour de l’accident, le module de saut était si dangereux que l’exploitant aurait dû l’interdire et le signaler, et après avoir rappelé que le snow-park était délimité et particulièrement signalé par un panneau entouré de deux triangles contenant un point d’exclamation pour signaler le danger, la mention du mot « attention » et les mots suivants : « L’utilisation du snow-park présente des risques / Sachez évaluer votre niveau », et qu’à l’époque de l’accident, il n’existait pas de normes de référence, la cour d’appel n’a fait que rappeler à qui incombait la charge de la preuve ; Attendu, enfin, que la cour d’appel a relevé, en premier lieu, que la pente de la piste d’impulsion était visible et que la preuve n’était donc pas rapportée d’un danger manifeste qui serait résulté d’une trop forte pente de cette piste, imprévisible pour un skieur averti ; qu’elle a énoncé, en deuxième lieu, que la mise en place d’une signalisation, après l’accident, ne pouvait être interprétée comme une reconnaissance de responsabilité ni comme un aveu du caractère anormalement dangereux de l’obstacle aménagé ; qu’elle a estimé, en dernier lieu, que les observations relatives à l’état de la neige sur le module de saut étaient imprécises et ne caractérisaient pas un danger anormal ou excessif ; que, par ces constatations et appréciations souveraines, et sans être tenue de procéder à la recherche prétendument omise, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ; D’où il suit que le moyen, inopérant en ses cinquième et sixième branches, n’est pas fondé pour le surplus ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. Benjamin X…, M. François X…, Mme Y…, épouse X…, Mme Malorie X…, Mme Sylvaine X… et M. Baptiste X… aux dépens ; Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille dix-sept.

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