Master 2 "Droit de la Montagne" - UGA USMB
Accident de ski/ Compétiteur malvoyant/ Enfant (sport étude)/ Faute du moniteur (non)
23/02/2022, Master 2 "Droit de la Montagne" - UGA USMB
Cour de cassation – Chambre civile 2
N° de pourvoi : 20-19.357
ECLI:FR:CCASS:2022:C200190
Non publié au bulletin
Solution : Rejet
Audience publique du jeudi 10 février 2022
Décision attaquée : Cour d’appel de Chambéry, du 12 mars 2020
Président
Pireyre (président)
Avocat(s)
SARL Le Prado – Gilbert, SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 10 février 2022
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 190 F-D
Pourvoi n° D 20-19.357
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 FÉVRIER 2022
1°/ la société MMA Iard,
2°/ la société MMA Iard assurances mutuelles,
ayant toutes deux leur siège [Adresse 3], et venant toutes deux aux droits de la société Covea Risks,
3°/ M. [V] [T], domicilié [Adresse 4],
4°/ Mme [A] [I], domiciliée [Adresse 6],
ont formé le pourvoi n° D 20-19.357 contre l’arrêt rendu le 12 mars 2020 par la cour d’appel de Chambéry (2e chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [H] [U], domicilié [Adresse 5],
2°/ à la société Allianz Iard, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
3°/ à Mme [R] [L],
4°/ à M. [S] [L],
5°/ à Mme [X] [L],
6°/ à Mme [Y] [L],
tous quatre domiciliés [Adresse 2],
7°/ à l’URSSAF du Languedoc-Roussillon, dont le siège est [Adresse 7], venant aux droits du RSI,
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat des sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, M. [T] et Mme [I], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de Mme [R] [L], Mmes [X] [L], [Y] [L], et M. [S] [L], de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de M. [U] et la société Allianz Iard, et l’avis de M. Grignon Dumoulin, avocat général, après débats en l’audience publique du 4 janvier 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Chambéry, 12 mars 2020), alors qu’elle effectuait des exercices sous la responsabilité de son moniteur, M. [U], assuré auprès de la société Allianz Iard, [R] [L], mineure, a été victime d’un accident de ski, suite à une collision avec M. [T], membre de l’équipe de France de ski paralympique en tant que malvoyant, accompagné de son guide, Mme [I].
2. [R] [L], ses parents et sa soeur ont assigné M. [T], Mme [I] et leur assureur, la société Covea Risks aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, ainsi que M. [U] et son assureur, la société Allianz, aux fins d’indemnisation de leur préjudice, en présence du régime social des indépendants du Languedoc-Roussillon.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Les sociétés MMA Iard et MMA Iard assurances mutuelles, M. [T] et Mme [I] reprochent à l’arrêt de les débouter de leurs appels en garantie de M. [U] et de la société Allianz, alors :
« 1°/ que le gardien de la chose tenu à réparation à l’égard la victime, dispose d’un recours pour le tout contre un coauteur fautif ; que le moniteur de ski est tenu d’une obligation de vigilance et de sécurité de moyens, s’agissant d’un sport potentiellement dangereux rendant nécessaire la fixation de règles précises ; qu’en déboutant M. [T] et les sociétés MMA lard et MMA lard assurances mutuelles de leur recours en garantie contre M. [U], moniteur de ski tenu d’une obligation de vigilance et de sécurité de moyens, et son assureur, en se bornant à relever que M. [U] avait vérifié l’inexistence d’un autre groupe de skieurs sur la piste au moment du démarrage de son exercice, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. [U] n’aurait pas dû, indépendamment du fait que la piste était totalement libre au moment de son départ, anticiper l’arrivée d’autres skieurs en amont dès lors que la piste était ouverte à tous, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382, devenu 1240, et 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil ;
2°/ que le gardien de la chose tenu à réparation à l’égard la victime, dispose d’un recours pour le tout contre un coauteur fautif ; que le moniteur de ski est tenu d’une obligation de vigilance et de sécurité de moyens, s’agissant d’un sport potentiellement dangereux rendant nécessaire la fixation de règles précises ; qu’en déboutant M. [T] et les sociétés MMA lard et MMA lard assurances mutuelles de leur recours en garantie contre M. [U], moniteur de ski tenu d’une obligation de vigilance et de sécurité de moyens, et son assureur, aux motifs que M. [U] « contest[ait] que son groupe se trouvait sur la partie gauche de la piste pour tourner sur la droite et couper ainsi la route de M. [T] sans que cela soit établi par les éléments de l’enquête », sans rechercher ainsi que cela lui était demandé, si le parcours établi par M. [U] ne comprenait pas une bifurcation importante vers une piste parallèle avec un changement brutal de trajectoire, ce qui imposait une mise en garde particulière de M. [U] à son groupe, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382, devenu 1240, et 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil ;
3°/ que le gardien de la chose tenu à réparation à l’égard la victime, dispose d’un recours pour le tout contre un coauteur fautif ; que le moniteur de ski est tenu d’une obligation de vigilance et de sécurité de moyens, s’agissant d’un sport potentiellement dangereux rendant nécessaire la fixation de règles précises ; qu’en considérant, pour débouter M. [T] et les sociétés MMA lard et MMA lard assurances mutuelles de leur recours en garantie contre M. [U], moniteur de ski tenu d’une obligation de vigilance et de sécurité de moyens, et son assureur, que n’était rapportée la preuve d’aucune faute d’encadrement, d’imprudence ou de négligence imputable à M. [U] et plus généralement de manquement à son obligation de sécurité de moyen, cependant qu’il résultait de ses constatations que M. [U] n’avait pu prévenir Mme [L] et son binôme du danger du fait qu’il ne s’était pas, comme il le devait, positionné en bas de piste pour observer ses élèves évoluer et que ses élèves avaient démarré prématurément leur descente à sa suite, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1382, devenu 1240, et 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil ;
4°/ subsidiairement que le gardien de la chose tenu à réparation à l’égard la victime, dispose d’un recours pour le tout contre un coauteur fautif ; que le moniteur de ski est tenu d’une obligation de vigilance et de sécurité de moyens, s’agissant d’un sport potentiellement dangereux rendant nécessaire la fixation de règles précises ; qu’en déboutant M. [T] et les sociétés MMA lard et MMA lard assurances mutuelles de leur recours en garantie contre M. [U], moniteur de ski tenu d’une obligation de vigilance et de sécurité de moyens, et son assureur, sans rechercher, comme elle y était invitée si le fait pour M. [U] de ne pas avoir exigé de ses élèves d’attendre qu’il soit positionné en bas de la piste avant de s’élancer, ce qui avait empêché qu’il puisse prévenir Mme [L] du danger, ne caractérisait pas un manquement du moniteur à son obligation de surveillance et/ou d’encadrement et de sécurité du groupe, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382, devenu 1240, et 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil. »
Réponse de la Cour
4. L’arrêt retient, par motifs propres, qu’il ressortait de l’enquête que M. [U] avait fait entreprendre à son groupe un exercice sur une piste qui était totalement libre, le groupe ayant été rattrapé par M. [T], qui évoluait à une plus grande vitesse qu’au cours dudit exercice, que la météorologie était bonne, la visibilité sur la piste et la qualité de la neige ne posaient pas de difficulté.
5. Il retient par motifs adoptés, que le rapport de gendarmerie n’a retenu aucun élément de nature à démontrer une faute de M. [U], qu’il n’est pas contesté qu’il a bien apprécié l’environnement et les conditions de ski de la piste au moment du démarrage de son exercice, en adéquation avec le niveau de son groupe, et qu’il a vérifié l’inexistence d’un autre groupe sur la piste au moment du démarrage de son exercice.
6. L’arrêt relève encore, que M. [U] avait donné à ses élèves toutes recommandations nécessaires pour effectuer l’exercice dans les meilleures conditions de sécurité, qu’aucun élément n’est rapporté quant à l’inadaptation de l’exercice donné, ce d’autant qu’il s’agissait d’élèves sport étude, que si M. [U] n’a pas pu prévenir le binôme de Mme [L] de l’imminence du danger, ce n’est que parce que le groupe avait démarré avant l’arrivée en bas de piste du moniteur, ce qui ne peut être reproché à M. [U], cette pratique étant habituelle dans un groupe de ce niveau technique, pour permettre une évolution fluide de celui-ci.
7. De ses constatations et énonciations procédant de son appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d’appel, qui n’était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a exactement retenu que M. [U], qui avait bien apprécié l’environnement et les conditions de ski et donné toutes recommandations nécessaires à ses élèves, n’avait commis aucune faute d’encadrement, d’imprudence ou de négligence, et en a déduit à bon droit que M. [T], Mme [I] et leurs assureurs ne pouvaient exercer un recours en garantie à son encontre.
8. Le moyen n’est, dès lors, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles, M. [T] et Mme [I] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [R] [L], M. [L], Mmes [X] [L] et [Y] [L] ainsi que la demande formée par les sociétés MMA Iard, MMA Iard assurances mutuelles, M. [T] et Mme [I] et condamne in solidum ces derniers à payer à M. [U] et à la société Allianz Iard la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt