Master 2 "Droit de la Montagne" - UGA USMB
Quad Festival Randos du Cantal/ Interdiction/ Légalité
14/07/2018, Master 2 "Droit de la Montagne" - UGA USMB
CAA de LYON
N° 15LY04123
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre – formation à 3
M. POMMIER, président
Mme Emilie BEYTOUT, rapporteur
Mme VIGIER-CARRIERE, rapporteur public
SCP MARTIN -LAISNE, DETHOOR-MARTIN, PORTAL,GALAND, avocats
lecture du jeudi 5 juillet 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société Macadam Holding et Globe Trotter a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d’annuler l’arrêté du 30 septembre 2014 par lequel le préfet du Cantal a interdit les randonnées dénommées » Quad Festival Randos » qu’elle souhaitait organiser du 3 au 5 octobre 2014.
Par un jugement n° 1402102 du 4 novembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 31 décembre 2015, la société Macadam Holding et Globe Trotter, représentée par MeA…, demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 4 novembre 2015 ;
2°) d’annuler l’arrêté du préfet du Cantal du 30 septembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– la compétence de l’auteur de l’arrêté n’est pas rapportée ;
– le préfet du Cantal a commis une erreur de droit en soumettant sa demande au régime de l’autorisation alors qu’elle relevait du régime de la déclaration ;
– le préfet était tenu de lui délivrer un récépissé dès lors que son dossier de déclaration était complet ;
– l’interdiction litigieuse porte atteinte à la liberté d’aller et venir, à la liberté du commerce et de l’industrie et à l’égalité entre les différents usagers du domaine public, alors qu’aucune menace à l’ordre public ne justifiait une telle mesure.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 août 2017, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu’aucun des moyens soulevés n’est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code du sport ;
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Beytout, premier conseiller,
– et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.
1. Considérant que, le 2 avril 2014, la société Macadam Holding et Globe Trotter a déposé une déclaration pour organiser du 3 au 5 octobre 2014 un événement dénommé » Quad Festival Randos « , se composant, d’une part, d’un salon commercial consacré au quad et, d’autre part, de randonnées en quad au départ d’Entraygues-sur-Truyère, entre l’Aveyron et le Cantal ; que le préfet du Cantal a interdit cet événement par un arrêté du 30 septembre 2014 ; que la société Macadam Holding et Globe Trotter relève appel du jugement du 4 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de l’arrêté du 30 septembre 2014 :
2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales : » La police municipale est assurée par le maire, toutefois (…) : 3° Le représentant de l’Etat dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à l’ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d’application excède le territoire d’une commune (…) » ; que l’arrêté d’interdiction en litige ne constitue ni un refus de délivrance d’un récépissé de déclaration ni un refus d’autorisation pris sur le fondement de l’article R. 331-18 du code du sport mais doit s’analyser comme une mesure de police prise sur le fondement de l’article L. 2215-1 précité du code général des collectivités territoriales, qu’il vise expressément ;
3. Considérant, en premier lieu, qu’en l’absence de situation de compétence liée, le moyen tiré de l’incompétence de son auteur est opérant ; que le signataire de la décision, M. B… D…, sous-préfet de Saint-Flour, disposait d’une délégation de signature en date du 19 août 2014 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs n° 22 d’août 2014 à l’effet notamment de se substituer au maire dans les cas prévus à l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’arrêté doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu’ainsi qu’il a été indiqué au point 2, l’arrêté en litige constitue une interdiction prise par le représentant de l’Etat dans le cadre de ses pouvoirs de police générale, comme il pouvait le faire, alors même qu’il était par ailleurs saisi par la société Macadam Holding et Globe Trotter d’une déclaration sur le fondement de l’article R. 331-18 du code du sport ; que, par suite, le moyen tiré de l’erreur de droit à avoir appliqué le régime de l’autorisation alors qu’il s’agissait d’une concentration comportant moins de 400 véhicules et soumise à ce titre au régime de la déclaration en vertu de l’article R. 331-18 du code du sport ne peut qu’être écarté, de même que le moyen tiré de ce que le dossier étant complet, le préfet était en situation de compétence liée pour délivrer le récépissé ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la date de l’arrêté en litige subsistait un doute sur le nombre de participants attendus, dès lors que si la société Macadam Holding et Globe Trotter avait indiqué dans sa déclaration la venue de 390 participants, elle n’avait mentionné qu’une centaine de participants dans son évaluation des incidences sur les zones Natura 2000 ; qu’en outre, les mesures prises pour assurer la sécurité des participants et des tiers, à savoir une organisation en groupe de 18 quads avec un ouvreur et un fermeur dotés d’une trousse de secours et de téléphones avec les numéros de secours, la traversée des zones habitées à allure modérée et la mise à disposition de deux secouristes par la fédération française de sauvetage et de secourisme ne disposant pas de véhicules d’intervention, apparaissaient insuffisantes au regard de l’étendue de la zone traversée ; que, de plus, la société Macadam Holding et Globe Trotter n’avait fourni aucune information sur le respect par les participants des règles relatives à la détention du permis de conduire pour les quads lourds, à l’homologation » route » des véhicules, à leur immatriculation ou encore au contrôle de leur niveau sonore ; qu’elle n’avait mentionné aucune mesure pour garantir la tranquillité, si ce n’est le passage à faible allure dans les zones habitées, sans garantie au demeurant sur les moyens mis en oeuvre pour assurer l’effectivité d’une telle mesure ; qu’enfin, le nombre annoncé de 390 véhicules participant à ces randonnées ne pouvait être sans conséquences sur la faune et la flore des zones concernées et sur celles des sites d’intérêts communautaires traversés, s’agissant en particulier du risque de détérioration du lit des rivières lors des passages à gué, ainsi que cela ressort de l’avis de la direction départementale des territoires du département du Cantal ; que, par suite, au vu de l’ensemble de ces éléments, le préfet du Cantal n’a pas, en interdisant dans le département les randonnées en quad dénommées » quad festival randos » du 3 au 5 octobre 2014, porté une atteinte excessive à la liberté du commerce et d’industrie dont bénéficie la société requérante ni à la liberté d’aller et venir des participants au regard des exigences de l’ordre public et de l’objectif de protection des espèces et des espaces naturels ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que la société Macadam Holding et Globe Trotter ne peut utilement invoquer la méconnaissance du principe d’égalité, eu égard à la différence de situation existant entre la concentration envisagée et les randonnées en quad de particuliers ou d’associations locales ;
7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société Macadam Holding et Globe Trotter n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;
Sur les frais liés au litige :
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Macadam Holding et Globe Trotter au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Macadam Holding et Globe Trotter est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Macadam Holding et Globe Trotter et au ministre de l’intérieur.
Délibéré après l’audience du 7 juin 2018 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
Mme C…et Mme Beytout, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 5 juillet 2018.
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N° 15LY04123