Culture(s) et territoires de montagne

La notion de “culture” est une entrée riche et relativement peu explorée pour questionner l’innovation territoriale du point de vue des relations entre la recherche et « l’action », singulièrement lorsque ces processus interagissent avec une institution de type « espace naturel protégé ». Dans le cadre de leur mission d’inventaire, de protection, de mise en valeur et d’animation du territoire « protégé », les parcs naturels sont en effet des acteurs clés des processus de recomposition continue des catégories de naturel et de culturel, ainsi que de social et de territorial. Il s’agira donc d’identifier et d’analyser les pratiques et les dispositifs innovants par lesquels ces catégories se trouvent repensées, renégociées, réassemblées. Les questionnements suivants ont été notamment abordés :

• quelles approches de la « culture » dans les espaces protégés, quelles définitions, quels outils mis en œuvre par les acteurs de ces territoires, pour quels objectifs ? cette approche a-t-elle évoluée depuis les années 1960 ? comparaison avec les modèles internationaux.
• un enjeu fort aujourd’hui face à la perception d’un danger de « banalisation » des espaces de nature, est de préserver et transmettre une « culture de la montagne » : quel contenu est donné à cette notion ; quel imaginaire et quelles pratiques de la montagne ? de quelles innovations font preuves, sur le terrain, les acteurs engagés au service de cette « culture de la montagne » ?
•  quelles postures et quels rôles de la recherche académique dans les processus « d’invention » des cultures et des territoires de montagne (présence des chercheurs dans les Conseils scientifiques de parcs, les structures associatives, participation à la définition et à la valorisation des objets patrimoniaux etc.)
• dans un contexte de généralisation des pratiques « participatives » et contractuelles, quelle est la capacité des acteurs et gestionnaires d’espaces protégés à « entendre » les recompositions culturelles et à comprendre leurs soubassements sociaux et politiques, notamment au travers des prises de parole non institutionnelles (et quel rôle des chercheurs en SHS dans cette ouverture ?).  Dans des lieux distants des centres culturels, comment s’inventent par ailleurs de nouvelles pratiques qui viennent questionner à la fois l’étanchéité des catégories artistiques, scientifiques économiques ou politiques et le postulat d’un éloignement de la culture des  territoires dits ruraux ? Corollairement quel rôle jouent (ou ne jouent pas) les institutions  dans la  mise en place et l’accompagnement de ces pratiques ?  Il s’agira donc ici d’analyser la capacité des espaces protégés à constituer de véritables territoires politiques.

Le collectif s’est donné pour projet à 3 ans de créer autour de ces questions un espace de réflexion partagée et ouvert sur l’espace social, entre chercheurs de profession et acteurs-chercheurs des territoires de montagne (habitants et usagers compris). Pour cela, il a mis en œuvre un dispositif  associant des enquêtes qualitatives sur des territoires différenciés, l’intégration de modules de formation innovants, ainsi que l’expérimentation de modes de restitution de la recherche in situ et la mise en œuvre d’une plateforme numérique dédiée (support : Carnets de recherche hypothèses.org).

L’enquête qualitative s’est appuyée notamment sur une recherche postdoctorale sur le thème « Les modes d’attachements pluriels au territoire d’un espace protégé dit « de montagne ». Permanences, héritages, recompositions culturelles, sociales et organisationnelles dans le Parc régional du Vercors »