Projet de recherche
Singulariser les territoires de montagne. Approches critiques des processus de labellisation dans les constructions territoriales
Du 15/04/2015 au 01/06/2018
Contexte
La quête de distinction est, depuis les années 2000, une voie privilégiée par les territoires ruraux. Elle s’opère via des labellisations qui mettent en jeu des valeurs autour des notions de patrimoine, d’environnement et de durabilité. Ce phénomène s’observe avec une acuité particulière en Europe dans l’ensemble des espaces de montagne.
Paradoxalement, en concourant aux multiples labels et marques, les territoires tendent à s’inscrire dans la dynamique concurrentielle du monde globalisé, tout en recherchant une manière propre d’exister. Cette quête, qui repose sur une identification explicite où chaque territoire se reconnait et se différencie, est par ailleurs prise dans des jeux de construction territoriale multi scalaire. Les singularités locales tendent ainsi à se dissoudre dans des territorialités plus vastes, celles des ensembles de grands massifs, des grandes régions, des grandes métropoles… Ces tendances fragilisent particulièrement les espaces dits protégés et notamment ceux, comme les Parc naturel Régionaux (PnR) ou les aires d’adhésion des parcs nationaux, dont la protection est de nature contractuelle et se construit sur une base volontaire des collectivités.
La phase actuelle de course à la distinction succède à plusieurs décennies d’une construction sociale et institutionnelle des territoires de montagne sur la base de caractérisations de nature économiques, socio-culturelles et/ou environnementales, aujourd’hui en cours de reformulation. Le mouvement de labellisation s’accompagne ainsi d’appels à l’innovation institutionnelle territoriale.
Par ailleurs, ces processus participent aussi d’innovations sociales, impliquant l’association de types d’acteurs diversifiés vers un objectif de changement, voire spécifiquement orientées vers l’amélioration de la « qualité de vie ». Dans cette approche, l’innovation sociale implique de transcender les objectifs purement économiques par de nouvelles valeurs répondant particulièrement à l’impératif de durabilité.
Questionnement
A travers l’analyse interdisciplinaire de processus de labellisations il s’agit :
- de voir comment se manifeste en pratique, sur les territoires de montagne, l’exigence sociale de singularité : quels sont les formes d’action et les objets par lesquels la distinction d’un territoire ou d’un lieu se construit ; quel rôle de la durée dans la construction des représentations de l’originalité d’un territoire ; quelles valeurs associées à cette distinction
- d’appréhender les tensions et les effets paradoxaux de cette quête de distinction, prise entre injonctions néo-libérales et désir de changement
- d’identifier comment se formulent les bases d’une « spécificité montagne » (par exemple dans les dossiers de classement, d’inscription ou de demandes de label comme dans les propos d’opposition à ces projets).
Objets étudiés
La diversité des terrains (massifs alpins, massif du Morvan, monts d’Ardèche) et des types de labels étudiés (parcs nationaux, parcs naturels régionaux, Géoparcs, Grands Sites, sites palafittiques du patrimoine mondial) vise à questionner la « spécificité montagne » normative établie par les pouvoirs publics. Ce choix permet également d’étudier la diffusion à l’international des processus de labellisation à partir d’un modèle localisé, ainsi que l’impact territorial d’une reconnaissance internationale.
Le LabEx ITEM consacre une enveloppe maximale de 75 000 € répartis sur la durée globale du projet selon un budget prévisionnel révisé annuellement.